SALIVES Jean, dit Claude Le Maguet

Fils d’un receveur des contributions indirectes Jean Salives, dit Claude Le Maguet, fut confié, à l’âge de six ans, à un orphelinat, après le départ de sa mère du domicile conjugal. Il en sortit à seize ans, ayant appris le métier de typographe et marqué par les idées libertaires. En 1903, il travailla d’abord comme apprenti puis il s’embaucha à L’Anarchie où il côtoya Libertad, le jeune Kilbatchich (futur Victor Serge), André Lorulot, Sébastien Faure… Appelé sous les drapeaux, il déserta après trois semaines. Ce fut le début d’une longue insoumission et illégalité, d’une vie de vagabond durant laquelle il dut changer de noms et de métiers. Passé en Belgique, il revint en France à Lens (Pas-de-Calais) où il trouva une place de typographe chez Benoît Broutchoux, d’octobre 1908 à la fin de 1909, et écrivit ses premiers articles dans Le Journal du Peuple . Arrêté à Lille lors d’une manifestation en faveur d’un camarade incarcéré, il fut condamné à un mois de prison. Il mena alors une vie errante sous différents pseudonymes: Trivaux, Prevel, Béhier, Malaise. Ayant trouvé un emploi à l’hôtel de ville, il dut l’abandonner à la suite des arrestations consécutives à l’affaire Jules Bonnot. En 1912, il rencontra Marcelle, qui deviendra sa compagne. Il passa ensuite en Suisse, travailla comme typographe à Lausanne, puis à Genève. À la déclaration de guerre, il resta fidèle à «l’internationalisme prolétarien» selon sa propre expression. Claude Le Maguet fit bientôt partie des milieux pacifistes et rencontra Frans Masereel, Henri Guilbeaux, Pierre-Jean Jouve, René Arcos, Romain Rolland, Birukoff, J. Humbert-Droz. En 1916, peu après la création de la revue «zimmerwaldienne» Demain (Genève, 1916-1919), et sur les conseils de son fondateur Henri Guilbeaux, il fonda, avec F. Masereel, Cécile Noverraz et Albert Ledrappier, la revue Les Tablettes (Genève) pour dénoncer la guerre. Les Tablettes n’adhérèrent jamais aux idées zimmerwaldiennes ni au programme bolchevik. Sa revue, marquée d’abord par les idées anarchistes, se rattacha à la philosophie de la non-violence inspirée par Tolstoï. «Ce fut la plus libre, la plus noble, la mieux rédigée et la mieux présentée de ces revues protestataires», écrivit M.Martinet en septembre 1919. Claude Le Maguet collabora également aux journaux suisses La Voix du Peuple, La Feuille (Genève), aux Cahiers idéalistes et aux Humbles (Roubaix, 1913-1914, puis Paris, 1916-1940) de Maurice Wullens. En 1920, Claude Le Maguet entra comme correcteur à la SDN. Après sa retraite, il revint en France, à la déclaration de guerre, ne voulant pas faire figure de réfractaire dans une guerre contre le fascisme. Il fut emprisonné à Lyon, puis à la caserne de Quimper. De retour à Genève, il fut, selon ses propres mots, «happé par la poésie». Il collabora après la guerre à Liberté (Paris, 1958-1971) de Louis Lecoin et aux Cahiers de l’Humanisme libertaire (Paris, 1963-1976) de Gaston Leval. Outre ses poèmes et articles, il a écrit Les Anarchistes et le cas de conscience (1921) et composé une Anthologie des écrivains réfractaires de langue française , parue dans la revue Les Humbles , août-octobre 1927).