Ouvrier mineur à Lens, Augustin Dehay fut renvoyé après les grèves de 1902. Il se fit alors marchand de journaux en particulier du Grand Écho du Nord le matin, cordonnier l’après-midi. Il utilisa, comme d’autres de ses collègues, une charrette attelée à un chien pour vendre ses journaux. Il se vit refuser l’autorisation d’utiliser son attelage par Basly, maire de Lens, après qu’un arrêté préfectoral eut confié aux maires le soin d’accorder de telles autorisations, tout comme Louis Level, Bernard et Tinclercq, tous révolutionnaires et opposés à la politique de Basly. Ces tracasseries durèrent jusqu’à ce que cet arrêté soit rapporté le 9 janvier 1904. Quand Dehay fut rappelé pour une période militaire de vingt-huit jours, la mairie de Lens lui refusa l’indemnité de 10 F qu’elle versait à tous les rappelés, patrons compris ( L’Action syndicale , 28 avril 1904). Car Dehay était aussi trésorier du Jeune Syndicat (Fédération des mineurs du Pas-de-Calais). Membre du Parti ouvrier de Guesde, il refusa de rallier le Vieux Syndicat de Basly, malgré l’ordre donné aux syndicalistes socialistes par le parti après l’unification des différents courants socialistes lors de la création du Parti socialiste unifié en avril 1905. Tous les récalcitrants, dont Dehay, furent exclus ( L’Action syndicale , 20 janvier 1907). Ce qui n’empêcha pas Dehay de se joindre à Dumoulin pour proposer, lors du congrès de Marseille, de rejoindre la CGT en octobre 1908, au nom de l’efficacité. Le 8 janvier 1906, un article du Réveil du Nord , signé par Basly, intitulé «Au pilori», accusa la Fédération des mineurs du Pas-de-Calais, et donc en premier lieu Dehay, son trésorier, d’avoir détourné une partie de l’argent recueilli pour soutenir les familles de mineurs morts dans la catastrophe de Courrières. La Fédération des mineurs du Pas-de-Calais demanda que l’affaire soit portée devant un jury d’honneur. Ce dernier mit hors de cause la gestion de Dehay, en soulignant que Basly et ses amis s’étaient dérobés, ne pouvant apporter la preuve de leurs accusations. La Fédération des mineurs cita alors Le Réveil du Nord et Basly à comparaître en correctionnelle pour injures publiques et diffamation, Dehay se joignant à l’action à titre personnel (27 janvier 1907). À son métier de vendeur de journaux, Augustin Dehay joignait d’autres activités «d’homme de presse». Il participait à la vie de L’Action syndicale et faisait partie de la commission du journal. Il y publia, avec Dumoulin, des communications sur la vie du «Jeune Syndicat», et surtout signa avec Monatte, rédacteur de L’Action directe , un long feuilleton «La vérité sur la grève de 1906», la grève qui suivit le drame de Courrières, paru dans L’Action syndicale en février et mars 1908.
Est-il besoin d’ajouter que Dehay était membre de la libre pensée «Ni dieu ni maître» de Lens?
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