Petit-fils d’un député dont l’amendement fit la République en 1875, Henri Wallon, et d’un artiste peintre, prix de Rome, Alphonse Victor Colas, le journaliste Alphonse Emile Alphonse Colas revendique plus de quarante ans de journalisme. Cependant, ce Lillois ne limita pas ses activités à la presse, on le retrouve en effet dans l’administration, mais aussi dans de nombreuses associations.
Bachelier ès lettres, Alphonse Colas, dont la famille maternelle a donné plusieurs militaires à la France, s’engage dès novembre 1895 pour quatre ans au 4e régiment de cuirassiers. De retour à la vie civile, il s’oriente vers le journalisme. Il est successivement rédacteur au Réveil du Nord, puis à L’Echo du Nord mais aussi correspondant et photographe de plusieurs journaux illustrés : l’Illustration, Le Monde illustré. En 1902, il fait partie des membres fondateurs de l’Association professionnelle des journalistes de la région du Nord. Selon la police, il est également professeur de sténo et sténographe du conseil municipal de Cambrai, ville dont son père est, lors de sa naissance, secrétaire de la sous-préfecture. En mai 1914, il aurait fait du contre-espionnage pour la Sûreté générale.
Mobilisé lors de la déclaration de guerre le 2 août, il se marie quelque deux semaines plus tard. avec Eugénie Octavie Huet, couturière. Le 22 novembre, il est blessé au combat. Invalide à 50 %, il est rayé des contrôles de l’Armée en février 1916. Il s’investit alors comme secrétaire dans différentes associations dont l’objectif est de venir en aide aux soldats et aux réfugiés, de préparer la reconstruction. Chargé, en novembre 1918, de la direction des bureaux de placement pour les soldats démobilisés, il est alors rédacteur en chef du Bulletin de renseignements sur les emplois civils réservés aux militaires et marins réformés n° 1 ou retraités par suite d’infirmités. En 1919, Colas est, pendant quelques semaines, attaché au cabinet d’Albert Lebrun, ministre des Régions libérées. A cette occasion, il fonde et dirige le Bulletin des régions libérées. A sa demande, il regagne Lille où il est nommé agent administratif des dommages de guerre, puis agent technique principal de la reconstruction agricole du département du Nord.
Si Alphonse Colas passe une quinzaine d’années dans l’administration, c’est bien dans la presse qu’il accomplit l’essentiel de sa vie professionnelle. De 1921 à 1926, il est rédacteur économique au quotidien Le Télégramme. Il est jusqu’en 1939 directeur du Progrès industriel. Revue mensuelle de l’industrie, du commerce, de l’agriculture, des expositions et des congrès. Elu secrétaire général de la Société d’horticulture du Nord, il prend également en charge la revue Le Nord horticole. A ce titre, il organise de nombreuses expositions d’horticulture et il est membre du jury de plusieurs d’entre elles. En 1928, le ministre de l’Agriculture le nomme ainsi chevalier de la Légion d’honneur. Cette nomination, sur intervention d’Albert Lebrun selon la rumeur, suscite de vives critiques dans la presse régionale, qui, rapporte la police, le juge « intriguant et ambitieux ».
Alphonse Colas déploie beaucoup d’énergie dans de multiple autres associations, il est ainsi délégué cantonal, secrétaire adjoint de l’Union départementale des sociétés de secours mutuels du Nord, vice-président de la Fédération des sociétés protectrices des animaux, membre de l’Office des pupilles de la Nation… Autant d’activités qui sont couronnées par sa nomination dans divers ordres : du mérite agricole français et belge, de l’Instruction publique, de Léopold (Belgique), du Nichan Iftikhar (Tunisie) et par l’attribution de décorations : médaille commémorative de la Grande Guerre, médaille interalliée de la Grande Guerre, médaille d’or des sociétés de secours mutuels, médaille d’argent de la Prévoyance… Membre du Comité exécutif du Parti radical et radical socialiste, il est même tenté par un mandat électif. En 1925, il se présente en vain aux élections municipales à Lille sur la liste de l’Union des gauches…
A la fin des années 1930, Colas ambitionne d’accéder au grade d’officier de la Légion d’honneur, mais il se heurte à l’opposition du préfet du Nord. Après la Seconde Guerre, il pense avoir de nouveaux titres à faire valoir pour parvenir à cette promotion. Dès la déclaration de guerre, il a en effet cessé toute activité de journaliste, mais s’est engagé en qualité d’infirmier-secouriste dans la défense passive. Durant l’Occupation, il diffuse autour de lui les nouvelles recueillies à la BBC et, dit-il, subventionne La Voix du Nord clandestine. Au milieu de l’année 1941, à la suite d’une dénonciation, son domicile est perquisitionné. En octobre, il l’est une seconde fois et, cette fois, l’occupant y découvre des armes, des drapeaux anglais et américains. Sa femme et lui sont ainsi mis au secret à la prison de Loos jusqu’en janvier 1942.
A la Libération, âgé de 68 ans, Alphonse Colas reprend du service comme inspecteur au contrôle militaire de l’information. Malgré, cette fois, l’avis favorable du préfet, qui salue un homme de « bonnes conduite et moralité et d’une parfaite honorabilité », il ne sera jamais nommé officier de la Légion d’honneur. Il meurt à Lille le 18 février 1950.